Des réformes impulsées par le sommet de l’Etat et des initiatives venant de la
baseLes pays du Moyen-Orient et de
l’Afrique du Nord (MENA) ont connu au cours de ces dernières années de
nombreuses avancées en matière de développement. Cependant, le chemin vers le
développement durable s’annonce encore long. Et pour cause, la connaissance
considérée comme étant le cœur et l’esprit du développement économique n’est pas
effectivement prise en charge. Et dire que le recours à l’économie fondée sur la
connaissance (EFC) a porté ses fruits à travers de nombreux pays dans le monde,
notamment la Corée du Sud dont l’expérience reste un exemple édifiant, de l’avis
même des spécialistes. Les pays qui ont compris que l’EFC est la solution clé
pour le développement durable ont entamé cette bataille depuis des décennies et
sont aujourd’hui à l’abri des crises conjoncturelles.
Ces pays ont investi dans
les piliers de l’EFC. Ils ont investi dans les aspects immatériels des
économies, à savoir l’éducation, l’innovation, les technologies de l’information
et de la communication (TIC) et dans l’amélioration de la gouvernance. Ils ont
fini par récolter les fruits de ces investissements pour servir aujourd’hui
d’exemples à d’autres pays comme ceux de la région MENA. Des pays où globalement
les stratégies de développement de l’EFC font défaut. Dans cette région du
globe, on en est encore au stade de réflexions et de visions, à quelques
exceptions. Pour cela, le temps n’est pas à l’attente mais au travail. Sur ce
point, les spécialistes ayant pris part à l’atelier sur les stratégies de
développement de l’EFC dans la région MENA convergent : «Il y a urgence, pas de
temps à perdre pour démarrer concrètement dans l’EFC loin des actions
sporadiques.»
Pour cela, des plans d’action à réalisation rapide sont à
identifier pour les pays qui ont déjà des stratégies comme l’Algérie et des
stratégies sont à mettre en œuvre pour les pays qui enregistrent un retard dans
ce domaine. Certes, il y a des différences entre les pays de la région mais la
nécessité d’aller vers l’EFC se fait sentir dans l’ensemble de ces pays. Que ce
soit en Tunisie, en Egypte, en Algérie, au Koweït, au Qatar… Le défi à relever
est le même pour concrétiser réellement l’EFC au-delà de l’amélioration de ses
piliers. Il s’agit de porter cette EFC du sommet à la base. Car, de l’avis des
spécialistes en la matière, en plus d’être pragmatiques et spécifiques à chaque
pays, les programmes EFC présentent des points communs : «La nécessité de
promouvoir la confiance et la cohésion sociale autour du programme EFC ; un
cadre d’intervention combinant des réformes impulsées par le sommet de l’Etat et
des initiative venant de la base, le tout accompagné d’une capacité de
communiquer une vision claire de l’économie de la connaissance.» C’est à ce
niveau que le travail se jouera notamment en Algérie où des étapes importantes
ont été franchies concernant l’amélioration des piliers de l’EFC,
particulièrement les TIC. Un pilier où les progrès les plus remarquables sont
enregistrés alors qu’à titre comparatif, en Tunisie, les améliorations sont
notables en matière d’éducation. Donc, en Algérie, cette volonté soutenue
d’aller vers la base doit se concrétiser par d’autres actions en direction de la
population. Il s’agit de sensibiliser les masses quant à la nécessité de ce
changement et de les inciter à innover, innovation au sens large du terme.
«Je crois sans doute que le pilier de l’innovation est le plus difficile
dans beaucoup de pays du monde arabe, notamment en Algérie où le problème du
financement ne se pose pas», estime à ce sujet, Kurt Larsen, expert à la Banque
mondiale. Pour sa part, Hescham Youssef, chef du cabinet du secrétaire général
de la Ligue arabe estime que l’innovation dans le monde arabe nécessite des
bases éducatives performantes. «Il ne s’agit pas d’utiliser les TIC à un haut
niveau mais d’aller au-delà», souligne le représentant de la Ligue arabe. Pour
cela, note-t-il, «il y a lieu de continuer les réformes engagées en matière
d’éducation en définissant les priorités». Pour M. Hesham Youssef, la volonté
politique de passer à l’EFC reste insuffisante.
«Ce n’est pas suffisant, il
ne faut pas qu’elle s’arrête au niveau du sommet de l’Etat. Il faut qu’elle se
manifeste par l’ensemble des acteurs de la société et à tous les niveaux de
gestion», explique-t-il, soulignant la nécessité de rétablir la confiance entre
les gouvernants et les gouvernés. «Rétablir la confiance nécessite du temps et
nous sommes sur le chemin du changement». Un point soulevé à maintes reprises
dans les débats. M. Hossam Babrawi, membre du Parlement égyptien et membre du
comité de gouvernance du Parti national démocratique a insisté sur cette
question, estimant que le rétablissement de la confiance ne peut se faire sans
un système démocratique. Une manière de dire que l’EFC est plus compliquée que
ce que l’on pense.
Par Samira Imadalou